Actu

Littératie en santé mentale : définition et importance

La capacité à reconnaître, comprendre et utiliser des informations sur la santé mentale varie fortement selon les groupes sociaux, l’âge ou le niveau d’éducation. Pourtant, une faible maîtrise de ces connaissances augmente les risques d’isolement, d’erreurs de jugement et d’accès tardif aux soins. Certaines politiques publiques intègrent désormais l’évaluation de ce facteur dans la prévention des troubles psychiques, alors même que son impact réel sur la qualité de vie reste largement sous-estimé.

Comprendre la littératie en santé mentale : origines, définition et enjeux actuels

Difficile de parler de santé mentale sans mettre la littératie sur la table. Ce terme, qui a vu le jour dans les années 1990 à travers les recherches d’Anthony Jorm en Australie, a marqué un tournant décisif dans la réflexion en santé publique. La littératie en santé mentale dépasse largement la simple connaissance des troubles psychiques. Elle recouvre l’aptitude à chercher, comprendre, évaluer puis utiliser l’information pour faire des choix avisés, reconnaître les signaux d’alerte, orienter vers l’aide adéquate et, surtout, tordre le cou aux préjugés tenaces qui entourent le sujet.

Les études menées à l’international, relayées en France par Ilaria Montagni à Bordeaux ou Stephan Van den Broucke en Belgique, confirment à quel point le niveau de littératie façonne les parcours de santé. Un faible niveau fragilise, expose davantage aux troubles, retarde la demande de soutien et complique l’accès à des ressources adaptées. Ce point est particulièrement frappant chez les jeunes et les étudiants. Une récente enquête québécoise indique d’ailleurs que près de 40 % d’entre eux se situent en deçà du niveau attendu en littératie sur ce sujet.

Avec le temps, la définition du concept s’est élargie. Impossible de passer à côté de l’impact du numérique : aujourd’hui, il faut savoir aussi distinguer les sources fiables, surtout sur internet. Cette évolution, observée aussi bien en Europe qu’au Canada, invite à repenser les stratégies éducatives et de prévention. Des institutions comme l’Institut de recherche en santé publique s’engagent à renforcer à la fois les compétences individuelles et collectives, tout en ciblant l’origine des inégalités liées à la littératie.

Comment évaluer et renforcer sa littératie en santé mentale au quotidien ?

Appréhender son niveau de littératie

Prendre du recul sur ses propres connaissances est une première étape pour évaluer sa littératie en santé mentale. Des questionnaires, conçus dans des équipes européennes et québécoises, existent pour mesurer sa capacité à reconnaître des symptômes, juger de la fiabilité d’une information ou s’orienter vers les bons relais. Les étudiants, régulièrement confrontés au stress et aux difficultés psychiques, disposent ainsi d’outils pour mieux cerner et développer leurs compétences.

Renforcer ses compétences au quotidien

Progresser passe par une démarche active : apprendre, s’informer auprès de sources fiables, échanger avec autrui. Face à l’inflation des infos en ligne, privilégier des ressources reconnues par le milieu universitaire ou médical aide à garder le cap. Dialoguer avec des professionnels, lors de rendez-vous ou ateliers, affine également le regard et permet de corriger ses automatismes.

Pour gagner en confiance et en aisance, voici quelques pistes concrètes à envisager :

  • Adopter une approche critique : identifier d’où vient une information, recouper les messages, rester vigilant face aux affirmations sans fondement.
  • Participer à des ateliers de sensibilisation ou des sessions de formation, proposés dans de nombreuses universités et associations.
  • Dialoguer avec son entourage pour confronter les points de vue : exprimer ses doutes ou questionnements permet souvent de faire tomber certains stéréotypes et de mieux identifier les obstacles à la recherche d’aide.

Développer ses connaissances sur la santé mentale ne repose pas uniquement sur des efforts individuels. L’environnement compte tout autant : qualité des relais de proximité, accessibilité de l’information, contexte social… Ces paramètres influencent fortement le parcours, notamment pour celles et ceux qui affrontent plus d’embûches, à l’image des jeunes ou des étudiants.

Des initiatives inspirantes pour promouvoir une meilleure santé mentale dans la société

Les actions pour soutenir la littératie en santé mentale se multiplient, de la France au Canada, en passant par le Québec. Au centre de ces démarches, un objectif clair : donner à chacun les moyens de reconnaître, comprendre et prévenir les problèmes psychiques. Depuis 2007, le Conseil canadien sur l’apprentissage a par exemple intégré dans ses outils pédagogiques des modules consacrés à la lutte contre la stigmatisation , un passage obligé pour libérer la parole et encourager la démarche de soutien. À Bordeaux, l’équipe d’Ilaria Montagni a mis au point des programmes sur mesure à destination des étudiants, avec le souci d’apporter des réponses adaptées à leurs besoins spécifiques.

La promotion de la santé mentale s’appuie sur des coopérations concrètes entre universités, établissements de santé et associations. Divers projets ont vu le jour, allant d’ateliers sur la gestion du stress à des séances axées sur la détection de signaux d’alerte ou le dialogue avec les professionnels. À Montréal, certains collèges mènent l’expérience d’intégrer la littératie en santé mentale à leur cursus, un choix audacieux qui montre que l’action peut commencer très tôt.

Le numérique n’est pas en reste. Plateformes interactives, podcasts, webinaires, applications accessibles sur mobile… L’offre s’élargit, y compris pour les publics qui peinent à se repérer dans le foisonnement d’informations. Mais il reste un défi à relever : rendre les contenus à la fois clairs, accessibles, et scientifiquement validés, sans jargon inutile.

Une dynamique collective prend forme. Campagnes nationales, interventions dans les médias, opérations au plus près du public dans les écoles ou les entreprises : chaque action renforce la déstigmatisation et intègre la santé psychique à la conception globale de la santé.

Au fil du temps, la littératie en santé mentale s’est imposée comme un chemin concret vers la prévention, le mieux-être et la solidarité sociale. Il n’y a plus qu’à transformer cet élan en réflexe quotidien, pour que chacun puisse avancer, lucide et serein, face à la complexité du monde d’aujourd’hui.